« Une Italienne de poche »

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L’Italienne à Alger de Rossini dans une mise en scène de Sergueï Safonov et sous la direction de Marc Bizzini au Théâtre Mouffetard, Paris.

Sympathique, gaie, virtuose et sans prétention, l’Italienne à Alger de Rossini que propose en version de poche – un orchestre réduit à trois instrumentistes – chaque soir jusqu’au 3 juillet le Théâtre Mouffetard est une de ces réussites populaires qui ne peuvent que propulser le public vers les grandes salles d’opéra.

Le plaisir vrai, voilà ce que l’on ressent après cette Italienne à Alger en réduction. Rossini avait 21 ans quand il a écrit cet opéra bouffe. Les interprètes de la compagnie In-Sense n’en n’ont pas beaucoup plus. Ils s’investissent à fond et prennent cette pochade au premier degré. Ils s’amusent et nous divertissent dans un orient kitsch et hollywoodien, tout en restant fidèles à l’oeuvre.

L’orchestre est réduit à trois instruments (piano, violon et violoncelle). Le pianiste Marc Bizzini et la compositrice, également flûtiste, Laurence Huc sont les auteurs de cette réduction qui est peut-être encore plus trépidante et drolatique que l’orignal. Passionnée par ce genre d’interventions, Laurence s’interroge en ce moment sur un autre spectacle, Hänsel et Gretel de Humperdinck. Les autres musiciens sont le violoncelliste Lionel Allemand et le violoniste Ludovic Passavant qui, entre tango argentin et musique tsigane, est un passionné de manifestations antagonistes qui vont d’Opéra-Éclaté aux journées Ravel.

Ce kaléidoscope musical est un plus pour de jeunes chanteurs qui, au contact de telles pointures, s’arrachent littéralement. Rossini est là tel qu’en lui-même, dans son inventivité et sa malice. L’histoire de l’Italienne à Alger, cocasse et fofolle, raconte comment Mustafa le bey, lassé par sa femme, rêve d’une autre conquête et se prend de passion pour une jeune naufragée italienne. Quiproquos, coqs à l’âne et autres irrévérences, tout se mélange, s’amuse, s’amourache multipliant les tours de passe-passe qui déjouent les projets du bey.

Pas un moment de répit : pour mieux suivre l’histoire, les récitatifs habituellement donnés dans les grandes maisons d’opéra sont remplacés par des dialogues en français. Cela simplifie. Dans un décor de toiles peintes caricaturalement hollywoodiennes, futés ou pas, assez mal habillés, les héros nous divertissent par leur vélocité leurs acrobaties musicales. La contralto Marie Blanc, élève de Nadine Denize et de Michel Sénéchal, la basse Julien Joguet, le ténor Éric Laigle ont des voix et un talent qui pourraient dans les années à venir nous donner de grandes et puissantes émotions.

Tout cela est classique, sympathique inventif et bon enfant : la quadrature du cercle musical.